Bavardage

Neuf mois sans résultat, et mon rejet est programmé !
J’analyse cette vibration, mais ne la décode pas.
Je suis capable de la différencier des borborygmes pharyngés,
bruits de fluide, flatulences, produits par mon Jaffa.
Je perçois un sens encore caché à cette onde.
Est-ce le signal étrange d’un autre monde ?

Je m’arqueboute contre la paroi, mon pied à l’opposé.
La sphère bascule et perd de la hauteur !
Puis elle est soutenue comme dans un étau chaud et fort.
A nouveau, la vibration m’environne, m’attendrit.
J’écoute, résiste à cette torpeur qui m’endort,
puis glisse dans mon liquide…Je n’ai rien appris !

 

 

A l’étroit ! J’ai trop à faire à me retourner dans ce cocon,
emberlificoté que je suis avec cet ultime cordon.
De terribles contractions ébranlent mon auspice.
Je me tasse au milieu de la matrice,
et me sens expulsé vers la lumière qui accélère
du rose orangé vers le blanc lumineux et clair.

Communiquer ! Tâche désuète face à ses agressions,
dont je suis la proie à ces actions d’extraction.
Mes poumons sont en feu, chaque alvéole s’emplit
d’une pression délétère, appelée air de vie.
Arrêter ! Laissez-moi souffler !

Je renvoie cet air par le conduit, et compose
des vibrations à deux muscles jusque-là inutilisés,
mes cordes de détresse, pour les sensibiliser.
La magie opère, les autochtones me posent
sur celle qui m’est toujours proche, ma mère !

Exister ! Ma présence n’est pas inopportune.
Vagissement, mains et pieds en lent brassage,
de la communication, j’en apprends le langage.
A sa mine fatiguée, je balbutie des sons en nocturne,
Pour recevoir chaleur et nourriture. Mais encore ?

J’émets ! Mes pensées agissent sur la raideur des cordes.
L’air, à leur passage, produit une mélopée
dont je contrôle la la puissance et la tonalité.
Je balbutie, bafouille, chuchote, puis gronde
jusqu’à articuler, argumenter, causer, et bavarder !

 

S’exprimer ! C’est se manifester, être entendu !
Et à trop utiliser cet avantage, c’est être reconnu
comme l’apanage du bavardage !
Quoi donc ! Ce bref commentaire, au livret scolaire,
ruinerait-il comme attribut toute une carrière ?

Fi donc ! C’est se raconter, expérimenter l’émotion,
partager ses passions, manifester de l’attention.
Et transmettre, c’est comme jeter des ponts !
C’est partager ce que l’on vit, ce que l’on pense,
c’est rejoindre ce que vit, ce que l’autre pense.

Mais c’est aussi user de compréhension,
graine d’amitié qui ne demande qu’à pousser,
pour que s’installe confiance et intimité.
Être bavard, c’est chercher une rencontre
où l’attention nécessite la vigilance de l’autre.

Car le revers de la médaille, c’est de multiplier
les occasions où la parole dépasse notre pensée.
Et blesser sans le vouloir, par le pouvoir d’un mot seulement,
c’est une fin de non-recevoir, un attentat verbal
où la langue rend exangue toute compréhension orale !

Parler ! Mais ni à tors ni de travers, s’évertuer
à garder les secrets qui nous ont été confiés.
C’est construire une amitié durable
avec ses alliés sans être indispensable,
en apprenant à écouter avant de parler.

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